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UN CHOC SANS PRÉCÉDENT

Ces deux dernières semaines le confinement s’est répandu à travers le monde entier. La mesure de ses répercussions sur la croissance économique est difficile tant sont nombreuses les inconnues : une seule certitude le déclin de l’activité est sans précédent depuis la seconde guerre mondiale et la plupart de nos économies seront en récession en 2020, notamment le monde développé dans son ensemble.

Notre analyse à aujourd’hui est d’une part que les révisions à la baisse des perspectives de croissance pour 2020 ne sont pas terminées mais aussi que d’autre part la vigueur et la forme du rebond qui suivra cette séquence est incertaine. De la réussite des plans de relance qui seront mis en place dépendra la vitesse et l’ampleur de la reprise.

Il est souvent question dans les inquiétudes que vous nous transmettez de l’explosion des déficits. Pour rappel, un déficit ou un endettement élevé n’empêche pas les économies de vivre et de prospérer. Le déficit budgétaire américain de 1943 à 1945 était de 26%, 21% et 20%. Et les taux d’intérêt étaient alors bien plus élevés qu’aujourd’hui. Le tout est que ces déficits produisent de la croissance.

Le PMI Markit Composite pour l’Eurozone de mars s’effondre à 29,7 venant de 51,6 en février. L’importance de ce mouvement le rend difficile à interpréter.

Pour l’Allemagne le composite est à 35,0 tiré vers le bas par les services à 31,7. Même histoire pour la France à 28,9. Si ces chiffres sont catastrophiques, ils sont pires plus au sud. Pour l’Espagne la chute est de 52,0 à 26,0 là aussi tirée vers le bas par les services et le composite italien à 20,2 avec un déclin brutal des services à 17,4.

Pour toutes les économies de l’Eurozone se sont les pires publications depuis le début des enquêtes.

Pour toutes les économies et secteurs on constate un effondrement de la production et des nouvelles commandes. Si les services sont pires que le manufacturier, celui-ci est aussi sévèrement atteint. La réduction des carnets de commandes conduit les entreprises à réduire leurs effectifs à la vitesse la plus rapide depuis 2009, l’Espagne enregistrant le recul le plus élevé.

Les perspectives à 12 mois se détériorent de façon significative, indiquant que les chefs d’entreprise n’ont pas idée de la durée du confinement.

Les données ayant été collectées du 12 au 26 mars, elles ne captent sans doute pas la fermeture totale d’activités non essentielles qui a été en moyenne pays le 21 mars.

Si l’on considéré que l’activité en Eurozone devait croître de 1% cette année, dès lors PIB= 101 et PIB mensuel =101/12= 8,41. Si l’on considère maintenant que nous perdrons 25%, ce qui semble un minimum, du PIB mensuel sur un mois au T1 et deux mois au T2, alors la perte de PIB est 8,41x3x0,25= 6,30% (vous pouvez vous même faire d’autres calculs quant à la durée ou la perte mensuelle). Dès lors le recul du PIB de l’Eurozone serait de -5,30% en 2020.

On peut faire des calculs avec des reculs mensuels de 35, voire 50%, et pour les mois suivants une reprise plus ou moins rapide. On voit bien que cela nous conduit sans forcer les chiffres à un recul du PIB de l’Eurozone autour de 10% cette année.

C’est pour cela qu’une nouvelle, et nous l’espérons importante, étape de solidarité européenne devrait être annoncée la semaine prochaine.

Il pourrait s’agir d’un plan comportant trois parties :

Le Mécanisme Européen de Solidarité (ESM) permettrait aux pays le tirage d’une ligne de crédit de 2% de leur PIB à 10 ans (soit 35 milliards€ pour l’Italie) dans des conditions très favorables, crédits à utiliser pour faire face à la crise du coronavirus.

La Banque Européenne d’Investissement (EIB) garantirait 50 milliards€ de prêts à des entreprises en difficulté.

La Commission Européenne mobiliserait 100 milliards€ pour un plan européen sur le modèle allemand « Kurzarbeitergeld » pour limiter les licenciements.

Est-ce que ce sera assez ? Impossible à dire mais pour ce qui concerne l’Eurozone le plus important n’est pas dans les détails techniques mais d’envoyer un signal aux marchés témoignant de sa solidarité et permettant d’enrayer toute velléité de dislocation des taux entre les pays de la zone.

Aux États-Unis, c’est la dégradation de la situation de l’emploi qui est impressionnante.

Les inscriptions hebdomadaires au chômage, à 6,6 millions au 28 mars ont établi un nouveau record, deux fois plus élevé que celui de la semaine précédente (3,3 millions) portant le nombre sur deux semaines à 9,9 millions alors qu’à fin février le nombre de chômeurs était de 5,8 millions ; Il a donc presque triplé en un mois !

Durant la Grande Récession de 2008/2009, il a fallu 18 mois pour totaliser une progression du chômage de cette importance. Et ceci alors que de nombreux états n’étaient pas en confinement le 28 mars.

Vendredi le Bureau of Labor Statistics a publié son rapport mensuel sur l’emploi lui aussi plus mauvais qu’attendu. Le consensus était à une perte de 100K postes et il y en a eu 701K avec 57K de révisions négatives sur les deux mois précédents. Le taux de chômage est passé à 4,4% (vs 3,5%). C’est impressionnant mais rien par rapport à ce qui nous attend en avril et mai qui pourraient amener le taux de chômage américain au-dessus de 12% une fois le confinement généralisé.

Malheureusement il est fort probable que le retour à l’emploi de ces nouveaux chômeurs sera beaucoup plus lent que la vitesse à laquelle ils ont perdu leurs jobs.

Pour commencer à appréhender cette seconde phase il faut regarder avec attention les données chinoises.

Le 3 avril le Caixin services PMI est sorti à 43,0 vs 26,5 en février, les attentes étaient à 35,0. C’est un fort rebond, mais, sous 50, il est encore en territoire de contraction ; Dans les détails, l’emploi à 48,0 vs 48,5 en mars se réduit à son niveau le plus faible de la série.

Le PMI officiel avait lui plus rebondi à 52,0 vs 35,7 en février pour le manufacturier avec une hausse de la demande domestique ; et le PMI officiel des services de 29,6 à 52,3 avec une reprise forte de la construction (55,1 vs 26,6). Rappel : ceci ne signifie pas que l’économoie est revenue à son niveau d’avant la pandémie pais plus modestement qu’elle a crû d’un mois sur l’autre.

Tout ceci nous amène à reproduire les prévisions de croissance révisées cette semaine par quelques bureaux d’étude respectés :

  • Eurozone 2020 GS -6,8%,
  • SG -6,1%, BoA -7,6%,
  • Capital Economics -6,0% à -12,0%,
  • Pantheon Macroeconomics -10%
  • Eurozone 2021 GS +6,6%, SG +7,1%, BoA +8,3%, Capital Economics +7,0% à +12,0%
  • États-Unis 2020 GS -5,7%, SG -1,5%, BoA -6,0%
  • États-Unis 2021 GS+6,6%, SG +0,8%, BoA +6,1%
  • Chine 2020 GS -1,1%, SG +2,9%, BoA +1,2%
  • Chine 2021 GS +5,3%, SG +8,2%, BoA +8,8%
  • Global 2020 GS -5,0%, SG -0,2%, BoA -2,7%
  • Global 2021 GS +6,4%, SG +3,7%, BoA +6,3%

La rapidité de révisions, d’une semaine à l’autre parfois, la dispersion des prévisions montrent bien qu’il s’agit d’un processus en cours. La tendance est claire sur 2020 : à la baisse. Et compte tenu des incertitudes qui demeurent sur 2020, la prudence s’impose sur les attentes de 2021.

Après le fort rebond de la semaine précédente (Windows dressing), les marchés clôturent en baisse : S&P500 -2,1%, Nasdaq -1,8%, Stoxx600 -0,6%, EuroStoxx50 -2,4%, CAC40 -4,5%, DAX30 -1,1%, Nikkei225 -8,1% et Shanghai SE -0,3% avec le Bund en hausse de 3,5bp à -0,44% et le 10 ans US -9bp à 0,599%, et un € qui se déprécie de 3% face au $ à 1,0805. Le pétrole est en forte hausse avec des rumeurs de rencontre entre saoudiens et russes le 9 avril : WTI +30% à 28,34$ et Brent +36% à 34,11$ le baril.

Sur la semaine les secteurs du Stoxx600 ayant le mieux performé sont Pétrole & Gaz (+9,0%) porté par la hausse des cours du pétrole, Santé (+5%) et Chimie (+3,1%). Les Banques (-11,4%) et Assurances (-5,8%) affichent les pires performances de la semaine suite aux annonces de suspension du dividende qui se multiplient ; l’aéronautique est aussi sévèrement touchée avec MTU Aero Engines -27,6%, Safran -27,6% et Airbus -27,4%.

Nos portefeuilles font une bonne performance relative, Erasmus Mid Cap Euro terminant la semaine positif alors que son indice recule de 1,63% et Erasmus Small Cap Euro compte une avance de 2,60% sur la semaine (+2,78% vs +0,18%) qui porte à 8,33% celle qu’Hugo a constitué depuis le début de l’année.

Notre stratégie compte tenu du manque de visibilité analysé ci-dessus reste défensive avec d’une part de 8,à 10% de liquidités dans les portefeuilles et d’autre part une allocation sectorielle prudente faisant une part réduite aux secteurs cycliques au profit de ceux qui offre plus de visibilité (croissance visible) et/ou un caractère défensif marqué comme la santé, l’agro-alimentaire, les services publics dont les énergie nouvelles.

FCP Mon PEA a cédé Bouygues, craintes sur les activités de TF1 et de la construction, et EDF, abandon du dividende plus pressions du gouvernement, et nous avons acheté Danone, entreprise très défensive agro-alimentaire, et Voltalia pour diversifier notre exposition aux énergies nouvelles, tout en prenant partiellement nos bénéfices sur Neoen au parcours éblouissant.

Aymeric et Hugo ont fini de sortir leurs lignes de l’irlandais Total Produce. Pour Erasmus Small Cap Euro, Hugo a également cédé SII et Tarkett, il est revenu sur Esker et Ipsos qu’il a déjà détenu en portefeuille et a acheté une ligne d’Olvi Oyj, entreprise finlandaise active dans l’industrie des boissons, spécialisée dans le développement, la fabrication et la commercialisation de bières, de cidres, de kvas, de long drinks, de boissons gazeuses, de jus de fruits, de snacks et d’eaux minérales.

Prenez soin de vous et bonne semaine à tous.

Jean-François GILLES

Président du Directoire d’Erasmus Gestion

Lire le point bourse de la semaine dernière :   https://www.tanguyfinances.fr/plutot-grosse-bertha-que-bazooka/

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