Défiscalisation : le taux de la réduction « Madelin » passe (enfin) mais provisoirement à 25 % ! (Décret 07/08/2020)

Dernière mise à jour le 20 août 2020

La hausse du taux de 18 % à 25 % attendue depuis 2018 s’applique à compter du 10 août dernier. Quelles sont les stratégies d’optimisation à mettre en œuvre ?

1. Ce qu’il faut retenir

Depuis le 10 août 2020, la réduction d’impôt sur le revenu « Madelin » passe à :

  • 25 % (au lieu de 18 %) pour les souscriptions au capital de PME, ou de parts de FCPI ou FIP non spécifiques,  
  • 30 % (au lieu de 38 %) pour les souscriptions de parts FIP Corse ou de FIP outre-mer.

Décret 7 août 2020, n°2020-1014
CGI art. 199 terdecies-0 A

Remarque : 
  • pour les souscriptions de FIP et FCPI, la réduction est calculée sur une fraction des sommes nettes versées : la seule quotepart du fonds correspondant aux titres éligibles (70 % minimum).
  • le taux passe aussi à 25 % jusqu’au 31 décembre 2020 pour les souscriptions au capital de sociétés foncières solidaires.
    Pour mémoire, il s’agit d’une nouvelle réduction mise en place par la loi de finances pour 2020 dont les modalités et les conditions sont proches de la réduction d’impôt Madelin IR PME.
    CGI art. 199 terdecies-0 AB.

2. Conséquences pratiques – Avis Fidroit

2.1. Date d’éligibilité du taux majoré

Le taux majoré de 25 % s’applique aux versements effectués à compter du lendemain de la publication du décret (jour ouvrable), soit du 10 août 2020 et jusqu’au 31 décembre 2020.

Les versements effectués après cette date « récupèreront » l’ancien taux de 18 %.

Seuls les taux spécifiques, applicables aux souscriptions de parts de FIP Corse ou de FIP outre-mer, resteront à 30 % au-delà du 31 décembre 2020.

Remarque :

Il est peu probable que la loi de finances pour 2021 prévoit une prorogation du taux majoré.
En effet, à l’origine la loi de finances prévoyait la mise en place de ce dispositif  de manière temporaire, afin de pallier à la suppression de l’ISF et, de fait, à celle de la réduction « ISF PME » et « ISF Fonds » (voir ci-dessous § « pour aller plus loin »).

2.2. Applications stratégiques de la majoration

Stratégie 1 : Souscription unique importante pour « figer » le taux de 25 %

Il peut être tentant de réaliser une « grosse » souscription en 2020 pour bénéficier à plein du taux à 25 %. Ainsi, une souscription avant le 31 décembre « figera » bien ce taux et la réduction d’impôt obtenue qui excède le plafonnement global des niches fiscal de 10 000 € est reportable les 4 années suivantes.

Notez que les versements ouvrant droit à la réduction d’impôt sont retenus dans la limite annuelle de 50 000 € pour un contribuable et de 100 000 € pour les contribuables soumis à une imposition commune. Mais si le versement d’une année excède ces limites, l’excédent donne droit une réduction d’impôt dans les mêmes conditions au titre des quatre années suivantes.

Toutefois, il convient de préciser que :

  • ce sont les excédents de versements qui sont reportables ; une réduction excessive n’est pas reportable.
    En effet, la réduction s’impute en priorité sur l’impôt sur le revenu de l’année du versement à concurrence de 10 000 €, même si l’imposition de l’année est plus faible. Seule la réduction qui excède 10 000 € est étalée dans le temps.
    BOI-IR-RICI-90-20-10, § 80, 90 et 210
  • si d’autres avantages fiscaux sont acquis la même année, ils ne seront pas pris reportables les années suivantes. Ils peuvent donc être définitivement perdus du fait du plafonnement global des niches fiscales.
    BOI-IR-RICI-90-20-10, § 220
Exemple :

Un contribuable célibataire effectue, le 1er septembre 2020, une souscription (libérée immédiatement) au capital d’une PME à hauteur de 50 000 €. Cette opération lui génère une réduction d’impôt au taux de 25 % : soit 12 500 € (dont obligatoirement 10 000 € pour 2020 et 2 500 € pour 2021).
Il est redevable d’un impôt avant réductions et crédits d’impôt de 6 000 € et bénéficie par ailleurs d’un crédit d’impôt récurrent de 1 550 €.
Le total des avantages fiscaux de 2020 est de 14 050 €.
En application du plafonnement global des niches fiscales, le total des avantages fiscaux ne peut pas dépasser 10 000 €.  Ses avantages fiscaux seront alors traités comme suit :

AnnéeImpôt sur le revenu calculé (brut)Imputation obligatoire RI MadelinAutres réductions ou crédits d’impôtPlafond niche fiscale (10 000 €)Impôt dû après réduction et crédit d’impôtRéduction reportable les années suivantesRéduction non reportable (perdue)
20206 000 €10 000 €1 550 €10 000 €2 500 €5 550 €
20216 000 €2 500 €1 550 €10 000 €1 950 €

Stratégie 2 : Libération progressive du capital social

Une solution alternative consisterait à effectuer une souscription importante au capital d’une société éligible, puis de libérer progressivement ce capital pour lisser la réduction d’impôt.

Cette stratégie peut paraître intéressante. Cependant, lorsque la libération effective des fonds intervient postérieurement à la souscription :

  • les réductions d’impôt sont pratiquées sur le montant des seuls versements libérés, retenus dans la limite du plafond annuel et selon le taux en vigueur à la date de la libération des fonds (sous réserve du respect des conditions d’éligibilité applicables à cette même date). Le taux n’est donc pas figé pour les capitaux libérés à compter du 1er janvier 2021.
    BOI-IR-RICI-90-20-10, § 1
  • la société bénéficiaire de l’augmentation de capital, soumise à l’impôt sur les sociétés, ne peut pas bénéficier du taux réduit de 15 % pendant toute la durée où le capital n’est pas intégralement libéré. Elle est soumise au taux d’IS de droit commun (28 % en 2020, 26,5 % en 2021, 25 % en 2022).
    CGI art. 219, I-2 b
    BOI-IS-LIQ-20-10 § 110 et s
Exemple :

Un contribuable célibataire effectue, le 1er septembre 2020, une souscription pour 50 000 € au capital d’une PME.
Il est redevable d’un impôt avant réductions et crédits d’impôt de 6 000 € et bénéficie par ailleurs d’un crédit d’impôt récurrent de 1 550 €.
Le capital est libéré progressivement entre 2020 et 2022 (17 800 € en 2020, 24 720 € et 2021 et 7 480 € en 2022).

AnnéeImpôt sur le revenu calculé (brut)Montant RI MadelinAutres réductions ou crédits d’impôtPlafond niche fiscale (10 000 €)Impôt dû après réduction et crédit d’impôtPertes réductions ou crédits d’impôt 
20206 000 €4 450 €
(17 800 x 25 %)
1 550 €
20216 000 €4 450 €
(24 720 x 18 %)
1 550 €
20226 000 €1 346
(7 480 x 18 %)
1 550 €3 104 €

Stratégie 3 : Augmentation de capital échelonnée sur plusieurs années

Pour éviter l’inconvénient lié au non bénéfice du taux réduit d’IS en cas de libération progressive du capital social, il peut être envisagé de procéder à une augmentation de capital échelonnée sur plusieurs années.

Néanmoins, cette stratégie ne permet pas de fixer le taux de 25 %.

De plus, il est plus difficile pour un souscripteur déjà associé de la société de bénéficier de cette réduction d’impôt au titre d’une augmentation de capital : au-delà du respect des conditions « classiques », il devra remplir 3 conditions supplémentaires cumulatives :

  • le souscripteur doit avoir bénéficié du dispositif « réduction d’impôt » au titre de son premier investissement au capital de la société bénéficiaire,
  • des investissements de suivi doivent avoir été prévus dans le plan d’entreprise de la société bénéficiaire des versements (pour les sociétés constituées à compter de 2016),
  • la société bénéficiaire de l’investissement de suivi n’est pas devenue liée à une autre entreprise (sauf tempérament prévu par le BOFiP).

Enfin, les augmentations de capital échelonnées dans le temps entraînent un coût non négligeable récurrent lié à la tenue d’une assemblée générale extraordinaire décidant de chaque opération, à la publication d’un avis de modification dans un journal d’annonces légales, à une mise à jour des statuts et au dépôt au greffe.

Stratégie 4 : Souscription via une holding

Passage par une holding passive

En cas de souscription via une holding passive, la réduction d’impôt est calculée sur la fraction représentative des souscriptions en numéraire réalisée par la holding dans des sociétés (filiales) éligibles à la réduction avant la date de clôture de l’exercice au cours duquel le contribuable a procédé à la souscription.
BOI-IR-RICI-90-20-10  § 20 à 50

Toutefois, le BOFiP prévoit un tempérament lorsque l’exercice de la société holding ne coïncide pas avec l’année civile. Dans ce cas, il est admis que le contribuable puisse bénéficier de la réduction d’impôt sur le revenu au titre de l’année civile au cours de laquelle est intervenu le versement de sa souscription au capital de la société holding, à condition que :

  • la société holding procède, avant la fin de ladite année civile, au versement de la totalité des souscriptions qu’elle a reçues,
  • et les versements du contribuable et de la société holding interviennent au cours du même exercice. »
    BOI-IR-RICI-90-20-10 § 80 et 90
​Exemple :

Un contribuable détient une holding passive qui clôture son bilan au 31 août 2021.
Le 15 septembre 2020 il effectue une souscription au capital de la holding pour 40 000 €.

La holding procède au réinvestissement dans une filiale opérationnelle en plusieurs fois :

  • 20 000 € en octobre 2020,
  • 15 000 € en janvier 2021,
  • 5 000 € en octobre 2021.

En principe, la réduction d’impôt est acquise en 2021 puisque la clôture de l’exercice intervient en août 2021. Le taux sera donc de 18 %, à proportion des sommes investies par la holding lors de cette période, soit 35 000 x 18 % = 6 300 €

Il aurait fallu que la holding réinvestisse la totalité de la souscription (40 000 €) avant la fin de l’année civile 2020 pour que la réduction d’impôt soit acquise en 2020 au taux de 25 %, soit 10 000 €.

Passage par une holding animatrice

Si la souscription est réalisée au capital d’une holding animatrice, celle-ci doit répondre aux mêmes conditions que les sociétés opérationnelles et à deux conditions supplémentaires, qui doivent être cumulativement remplies au jour de la souscription. Ainsi, la holding doit :

  • être constituée depuis au moins 12 mois,
  • contrôler au moins une filiale depuis au moins 12 mois.

BOI-IR-RICI-90-10-20-10, § 20

Stratégie 5 : Souscription indirecte via un fonds (FIP / FCPI)

Il est possible de bénéficier de la réduction « Madelin » en effectuant un versement au titre de souscriptions en numéraires de parts de FCPI ou de FIP sous réserve du respect de certaines conditions, dont notamment le fait que le fonds respecte au minimum un quota d’investissement de 70 % dans des PME éligibles.

Pour les versements effectués depuis le 10 août 2020, la réduction d’impôt est égale à :

  • 25 % de ce montant pour les souscriptions en numéraires dans un FCPI ou un FIP non spécifique (à condition de respecter les plafonds) réalisées jusqu’au 31 décembre 2020.
  • 30 % de ce montant pour les souscriptions en numéraires dans un FIP Corse ou FIP Outre-mer.

Toutefois, pour ces investissements réalisés via des FIP ou FCPI, la réduction est calculée à compter du 10 août 2020, après imputation des droits ou frais d’entrée, à proportion du quota d’investissement que le fonds s’engage à atteindre (soit 70 % au minimum).
CGI art. 199 terdecies-0-A, VI, 2.

En pratique, ceci réduit significativement l’assiette de la réduction :

 FCPI ou FIP non spécifiqueFIP Corse ou FIP Outre-mer
Taux de réduction théoriqueDu 10/08/20 au 31/12/20
25 %
Du 10/08/20 au 31/12/20
30 %
Après le 31/12/2020
18 %
Après le 10/08/20
30 %
Taux de réduction minimum réel (hypothèse : quota d’investissement de 70 %)(*)
 
Du 10/08/20 au 31/12/20
17,5 % (25×70 %)
Après le 10/08/20
21 % (30×70 %)
Après le 31/12/2020
12,6 % (18×70 %)
Taux de réduction potentiel (hypothèse : quota d’investissement de 90 %)  (*)(**)
 
Du 10/08/20 au 31/12/20
22,5 % (25×90 %)
Après le 10/08/20
27 % (30 x 90 %)
Après le 31/12/2020
16,2 % (18×90 %)

(*) Hypothèse réalisée sans prendre en compte les frais de souscription ou frais d’entrée.

(**) Hypothèse de quota probable

Avis Fidroit : 

L’entrée en vigueur de la hausse du taux à 25 % pour la réduction Madelin, attendue depuis la loi de finances pour 2018, est une bonne nouvelle pour les investisseurs. En pratique, elle sera surtout favorable aux contribuables qui souscrivent en direct à compter 10 août 2020. Mais c’est provisoire…

De plus, il est nécessaire de prendre en compte toutes les conséquences induites par les souscriptions, dont notamment :

  • La baisse du taux de réduction à 30 % pour la réduction « IR Corse ou Outre-mer », ainsi que l’assiette de réduction qui n’est plus de 100 % du montant de la souscription, mais limitée au quota d’investissement que le fonds s’engage à atteindre. Cette règle continuera à s’appliquer pour les versements postérieurs au 31 décembre 2020.
  • En cas de cession des titres, si contribuable a bénéficié de la réduction d’impôt pour investissement au capital de PME en direct, le prix d’acquisition devra être diminué du montant de la réduction d’impôt pour le calcul du montant de la plus-value,
    BOI-RPPM-PVBMI-20-10-20-10, § 20 et 30

3. Pour aller plus loin

Initialement, la loi de finances pour 2018 avait porté le taux de la réduction Madelin de 18 à 25 %.

Cette mesure était destinée à compenser la suppression de l’ISF puisqu’auparavant l’investissement dans ces souscriptions éligibles permettaient de défiscaliser jusqu’à 50 % (« ISF-PME » et « ISF-Fonds »). 

Le législateur avait donc prévu une mise en place temporaire du taux majoré, applicable aux versements effectués :

  • à compter d’une date fixée par décret ne pouvant être postérieure de plus de 3 mois à la date de réception par le Gouvernement de la réponse de la Commission européenne permettant de la considérer comme conforme au droit de l’UE 
  • et jusqu’aux versements effectués jusqu’au 31 décembre 2018.

 CGI art. 199 terdecies-0 A, I, 1°

La loi de finances pour 2018 a aussi réduit, à compter de l’entrée en vigueur du décret, l’assiette de la réduction d’impôt sur le revenu à compter du 1 janvier 2018 : celle-ci n’est plus de 100 % du montant de la souscription, mais du montant de la souscription retenu à proportion du quota d’investissement que le fonds s’engage à atteindre, soit 70 % au minimum.

CGI art. 199 terdecies-0 A, V, 2
Loi de finances pour 2018, art. 74

En 2018 et en 2019, la Commission européenne n’ayant toujours pas validée la mesure de majoration du taux à 25 %, aucun décret n’a été publié (malgré une prorogation d’un an par la loi de finances pour 2019).

La loi de finances pour 2020 a donc prorogé de nouveau d’un an l’application du taux majoré. Elle a aussi aménagé les régimes spécifiques des fonds investis en Corse et en outre-mer pour lesquels le taux dérogatoire de 38 % a été abaissé à 30 % à compter de la date d’entrée du décret susvisé.

CGI art. 199 terdecies-0 A, VI ter et VI ter, A

La Commission européenne a fini par donner son accord le 26 juin 2020, ouvrant droit à la publication d’un décret d’application.

Décision CE C(2020) 4189 du 26 juin 2020 autorisant le dispositif « IR-PME » de réduction d’impôt sur le revenu pour la souscription au capital de PME.

Le décret du 7 août 2020 est venu rendre effective :

  • la hausse du taux de 18 à 25 % pour l’investissement en direct au capital de PME, ou en parts de FIP ou FCPI.
  • la baisse du taux dérogatoire de 38 à 30 % pour les investissements en Corse et en outre-mer effectués par l’intermédiaire de FIP.
  • la prise en compte du quota d’investissement dans l’assiette de la réduction pour les souscriptions de parts de FIP ou FCPI.

Source : Fidroit

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