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Point Bourse Hebdomadaire du 26 novembre 2018 : La croissance reste sous pression

Les semaines se suivent et se ressemblent : la dernière apporte encore de nouveaux éléments qui témoignent d’une dégradation progressive de l’activité et d’une croissance qui ralentit.

Selon nos analyses les prévisions de croissance 2018 et 2019 des gouvernements, banques centrales et organismes économiques publics ou privés ne sont guère crédibles : un peu partout dans le monde la croissance 2018 devrait atterrir 0,2 ou 0,3% sous les prévisions d’aujourd’hui et les attentes 2019, du moins pour le 1er semestre, vont nécessairement être revues à la baisse. Dans ce contexte il est probable également que les attentes de bénéfices des entreprises soient trop optimistes et seront revues.

Un espoir apparaît depuis quelques semaines : la baisse du prix du baril de pétrole. L’énergie est une composante importante du budget des ménages et des charges des entreprises et le recul des prix de l’essence, du gasoil et du fuel profiterait à la consommation et aux marges. Encore faudrait-il que des taxes nouvelles au mauvais moment n’effacent pas l’effet attendu.

 Selon les indices PMI Flash IHS Markit pour l’Eurozone, celle-ci enregistre sa plus faible croissance depuis près de 4 ans, l’indice Composite se replie à 52,4 (53,1 en octobre), plus bas de 47 mois, celui des Services à un plus bas de 25 mois et le Manufacturier de 65 mois.

Ce repli de la croissance de l’activité s’explique par un ralentissement de la hausse des nouvelles affaires. Tiré à la baisse par un 2ème recul mensuel des exportations, le taux d’expansion des ventes affiche son plus faible niveau depuis janvier 2015. Les nouvelles affaires à l’export enregistrent leur plus forte baisse historique en novembre.

Les fabricants de la zone euro signalent un ralentissement de la hausse de l’activité plus important que celui enregistré dans le secteur des Services. La production manufacturière n’augmente que très légèrement, le taux d’expansion affichant son plus faible niveau depuis le début de la reprise dans ce secteur en juillet 2013. Cette quasi stagnation de la production résulte d’une 2ème baisse mensuelle consécutive du volume des nouvelles commandes et des commandes à l’export.

Les entreprises manufacturières attribuent ce ralentissement de la croissance à la faiblesse de la demande sur les marchés mondiaux, à un climat politique et économique de plus en plus incertain, aux guerres commerciales et à la morosité des ventes dans le secteur automobile.

La conjoncture reste plus solide dans le secteur des Services, le dynamisme du marché de l’emploi dans certains pays soutenant les dépenses de consommation et stimulant la hausse du volume des nouvelles affaires. Le ralentissement observé ces derniers mois ne se limite plus à l’industrie manufacturière, le secteur des Services enregistre sa plus faible croissance depuis plus de 2 ans. Les prestataires de services signalent la plus faible hausse du nombre de nouveaux contrats depuis 25 mois et leurs nouvelles affaires en provenance de l’étranger enregistrent leur plus forte baisse depuis près de 2 ans.

L’affaiblissement de la hausse des nouvelles affaires entraîne une baisse des contraintes de capacité dans les entreprises, il n’y a qu’une très légère accumulation des affaires en cours, la plus faible depuis plus de 2 ans.

Parallèlement les créations de postes ralentissent, le taux de croissance fléchissant à un creux de 22 mois ; L’affaiblissement de la hausse des carnets de commandes et des perspectives d’activité conduisent les entreprises à revoir à la baisse leurs décisions d’embauche. L’optimisme des entreprises quant à une croissance de leur activité au cours des 12 prochains mois chute à un creux de 4 ans.

En Allemagne la conjoncture reste préoccupante, la croissance se replie à un plus bas de près de 4 ans. Les fabricants allemands signalent une quasi stagnation de leurs volumes de production, l’expansion étant la plus faible depuis avril 2013. Si le secteur des services affiche de meilleures performances, le taux de croissance se replie à un plus bas de 6 mois.

La France enregistre une croissance plus solide que celle de l’Allemagne pour le 2ème mois consécutif et le taux d’expansion ne se replie que très légèrement. La hausse de l’activité est toutefois la plus faible enregistrée depuis décembre 2016. Dans l’industrie manufacturière la production recule pour le 2ème mois consécutif, cette tendance étant compensée par une croissance forte, mais moins soutenue qu’en octobre, des services. Les perspectives d’activité à 12 mois affichent leur plus faible niveau depuis 2 ans, certains répondants se disant préoccupés par la morosité de la demande clients et par l’affaiblissement de la conjoncture économique mondiale.

Les données Flash ne signalent qu’une faible croissance dans le reste de la zone €, la hausse de l’activité ralentit et le taux d’expansion affiche son niveau le plus faible depuis novembre 2013. L’Italie se dirige probablement vers une récession.

Bruno Cavalier (Oddo BHF) commente ainsi ces dernières publications : »Selon les données préliminaires pour novembre, le climat des affaires continue de reculer en zone €. Il y a certes des signes de stabilisation en France et en Espagne, mais la correction se poursuit en Allemagne et en Italie. Les raisons n’ont rien de comparable. En Italie, l’incurie politique du gouvernement a mis l’économie au bord de la récession. En Allemagne se combinent ou se succèdent divers problèmes : perturbations du secteur automobile, perte de navigabilité du Rhin, baisse de la demande extérieure. En France même, les protestations des gilets jaunes perturbent les chaînes d’approvisionnement. Additionnez tout ça et vous placez un sérieux ralentisseur sur la trajectoire de la croissance ».

L’indice de confiance des consommateurs de la Commission Européenne décline en novembre de -2,7 à -3,9, un plus bas de 20 mois. Il est cohérent avec les autres indicateurs mais reste bien au-dessus de sa moyenne de long terme (-12).

En novembre et pour la France, l’indicateur de climat des affaires de l’INSEE est stable et demeure à un niveau relativement élevé (104 vs moyenne de 100). Il est stable dans les Services et le Commerce de Gros. Il gagne un point dans l’industrie et le Bâtiment et deux points dans le Commerce de Détail. Le climat des affaires reste au-dessus de sa moyenne dans chaque secteur. Le climat de l’Emploi est un peu moins favorable, son indicateur perd 2 points et retrouve son niveau du début 2017 tout en restant bien au-dessus de sa moyenne de longue période.

 

Aux États-Unis aussi le pic semble derrière nous. L’IHS Markit Flash US PMI recule à 54,4 (vs 54,9), il reste cependant bien au-dessus de celui de l’Eurozone (52,4).

Si la demande domestique reste solide, les nouvelles commandes ralentissent pour le 2ème mois consécutif et sont à leur niveau le plus faible de 2018. Ceci contribue à réduire le travail en attente et, partant, les créations de postes à leur niveau le plus faible depuis juin 2017. De même la confiance des répondants sur leur activité à 12 mois se modère.

Les Leading indicators du Conference Board sont presque au plus bas depuis 2 ans à 0,1 et compte tenu de 2 composantes publiées depuis celle du Conference Board et qui sont en retrait, tout indique que celui-ci sera négatif en décembre pour la 1ère fois depuis la période janvier à mai 2016. Ceci n’indique pour autant pas une récession mais confirme un ralentissement économique en 2019.

Le Department of Commerce a publié les chiffres d’octobre pour les permis de construire (-0,6% m/m et -6,0% y/y), et les mises en chantier (+1,5% m/m et -2,9% y/y). Depuis deux ans maintenant ces chiffres sont stables. La faiblesse des taux au lendemain de la récession a permis à la Fed l’injection de beaucoup de liquidités qui ont stimulé les secteurs automobile et immobilier. Avec la remontée actuelle des taux on peut s’interroger d’une part sur la capacité d’achat des classes moyennes et modestes et d’autre part sur l’effet d’un ralentissement des secteurs automobiles et immobilier sur l’ensemble de l’économie et la croissance 2019.

Tous les marchés, européens, américains et asiatiques ont poursuivi leur mouvement de correction cette semaine toujours sur fond de craintes de ralentissement de l’économie mondiale, de tensions commerciales et politiques persistantes et de chute du pétrole.

Les reculs sont importants à nouveau : S&P500 -3,5%, EuroStoxx50 -1,4%, CAC40 -1,6% et Shanghaï SE -3,7%. Les taux ont reculé, Bund 0,34% (+2,7bp), OAT 0,72ù (-4,2bp) et l’€ se déprécie face au $ de -+0,72% à 1,133.

Le secteur Voyages & Loisirs (+2,2%) surperforme le Stoxx600 grâce à Compass (+5,4%), bonne publication et très bonne tendance en Amérique du Nord. Les compagnies aériennes bénéficient de la baisse des cours du pétrole : Ryanair (+4,9%), Air France (+5,5%) et Lufthansa (+3,8%) . Automobile (+0,7%), Distribution (+0,4%), Agro-alimentaire (+0,2%), Santé et télécommunications (+0,1ù) sont les autres secteurs gagnants.

Au contraire, matières Premières(-5,6%), Pétrole & Gaz (-4,5%) et Chimie (-2,9%) affichent les pires performances suite au décrochage des prix du pétrole sur fond de craintes d’un ralentissement de la demande mondiale dans un contexte d’offre de pétrole abondante : Total (-4,8%), Royal Dutch Shell (-4,1%) et BP (-2,3%).

Le consensus des prévisions bénéficiaires JCF/FactSet sur le Stoxx600 européen a une croissance annuelle attendue de +5,4% pour 2018 et +9,7% pour 2019. Aux États-Unis pour le S&P500 la croissance des bénéfices est attendue à +18,8% pour 2018 et à +6,9% pour 2019.

Jean-François GILLES

Président du Directoire d’Erasmus Gestion

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